Faut-il craindre le pire ?

Voir le verre à moitié plein ou à moitié vide n’est pas seulement un trait de caractère qui oppose les individus entre eux, mais une attitude commune de nos observateurs de la société, qui à longueur d’analyses et de chroniques défendent ardemment un seul point de vue, le plus souvent celui du pire, même si, comme le souligne Edgar Morin, le pire n’est jamais certain. Les adversaires du pire, quant à eux, dénoncent la propension des médias à nourrir le catastrophisme ambiant en ne transmettant que des informations négatives, en pointant tout ce qui va mal dans le monde tout en ignorant sciemment les nombreuses manifestations constructives.

Les responsables des médias se défendent en arguant que les bonnes nouvelles ne sont pas vendeuses – on n’échappe pas à la tyrannie du marché. D’où vient en effet que beaucoup d’entre nous sommes attirés voire fascinés par le côté destructeur de la vie ? Faut-il y voir à l’œuvre la pulsion de mort de Freud, ou encore une forme de consolation de notre propre mal-être par la contemplation du malheur des autres et du monde ? Les deux sans doute. Mais il serait absurde de reconnaître ces pulsions dans les réflexions de nos plus grands penseurs, connus ou anonymes, qui s’inquiètent des orientations prises par les décideurs dans tous les secteurs et de leurs conséquences si elles n’étaient pas contrebalancées par d’autres forces.

La revue Clé, un magazine cent pour cent « positif », a exposé dans sa publication de septembre/octobre cinq raisons d’espérer : contrairement aux apparences, la violence a beaucoup baissé dans le monde ; la santé et le bien-être se développent à grande vitesse ; jamais nous n’avons été autant instruits et nos facultés cognitives ne cessent de croitre ; l’écologie se développe, même si tout reste à faire ; les valeurs humanistes progressent partout dans le monde. Mais ces nouvelles réjouissantes ne doivent pas nous rendre aveugles à un autre versant de la réalité : le vide laissé par la fin des idéologies est celui de tous les dangers. Ce ne sont pas tant les extrémismes qu’il faut craindre, ni même la pollution ou l’épuisement des ressources – tout cela peut trouver ses solutions – mais que l’homme lui-même se prenne pour le démiurge…

 

Publié le : 11/11/2015

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