Avons-nous besoin d’une nouvelle religion ?
Comment instaurer un rapport plus juste de l’homme à la nature, comment rompre avec le paradigme de la domination et de l’exploitation et le remplacer par celui de l’égalité et de la coopération ? Pour le pape François, qui a consacré une encyclique à ce sujet, la religion doit jouer un rôle fondamental. Si cette position est sans surprise, elle est aussi partagée par l’historien médiéviste américain Lynn White qui entrevoyait dès les années 60 les conséquences sur la nature de notre mode de vie moderne, et plaçait son espoir pour l’homme de renouer un rapport plus juste avec elle dans une nouvelle religion.
Pour Lynn White, la racine de notre crise écologique actuelle se trouve dans les textes bibliques. D’après lui, c’est la rupture du christianisme avec le paganisme de l’Antiquité – où chaque source, colline, prairie avait son génie des lieux – et son incitation à nous rendre maîtres de la nature qui est à l’origine de notre comportement actuel, bien plus que le développement des techniques qui n’en est qu’une conséquence. Si l’interprétation de White peut être sujette à caution, son idée d’une nouvelle religion mérite réflexion. Car si la raison seule – à la condition qu’elle renonce à servir des intérêts autres que le bien commun – pourrait suffire à concevoir les mesures à prendre, il lui manque la dimension de la sensibilité, seule à même de donner chair dans le vécu de chacun par un réajustement profond des comportements. Surtout, il manque à la raison la dimension morale, spirituelle pour ancrer de manière durable un nouveau paradigme écologique.
Si une nouvelle religion devait naître du chaos et de la détresse actuelle, elle ne pourrait être l’apanage d’un groupe particulier dans notre contexte mondialisé. Sa première mission serait sans doute de rassembler les hommes entre eux, avant de rétablir l’osmose perdue avec la nature. Sera-t-elle portée par un grand personnage historique ou émergera-t-elle plutôt de l’effort des différents courants religieux de réinterpréter les textes à la lumière de l’intelligence collective actuelle ? Cet effort de comprendre le message de la religion de l’autre, et passant, de reconsidérer la sienne propre ou de découvrir celle qui est à l’origine de sa culture, sans oublier la profonde spiritualité des peuples premiers, pourrait conduire à la prochaine grande révolution sur notre petite planète bleue.
Publié le : 18/11/2015